Pamela Pianezza est photographe de cinéma et enseignante en arts visuels. Elle écrit pour le théâtre, l’édition et la presse et tient une carte blanche dans la revue La Septième Obsession

1 – Ton confinement : il a lieu où et tu l’envisages/le vis comment?

Mon confinement est bordelais, à quelques kilomètres seulement de ma famille, ce qui me parait plus ou moins loin selon les jours. Je ne l’envisage pas vraiment, je me contente d’essayer de le vivre au jour le jour. Quand j’y arrive je trouve ça déjà très bien.

2 – Comment tu as connu le Lab et ce que tu y as vécu, ce que tu en penses

J’ai découvert le Lab aux Arcs, pendant le festival, il y a quelques années. Il m’évoque avant tout une rencontre avec deux personnalités solaires et inspirantes, Fabienne Silvestre, cofondatrice du Lab et Maria Raluca Hanea, programmatrice et poète. Il m’évoque aussi ce lieu imaginé par Charlotte Perriand qui a toujours eu sur moi un étrange pouvoir de fascination, en ce qu’il rend chaque année possible un improbable huis-clos artistique.

La réflexion est un exercice souvent solitaire qui peut perdre de sa force ou pousser à la folie si elle ne se confronte jamais à l’altérité. Travailler collectivement, posément, en altitude, autour de cet indispensable objectif commun des moyens pour parvenir à une égalité femmes-hommes est une chance rare.

3 – Cite un ou plusieurs films réalisés par des femmes qui t’ont marquée et que tu as envie de faire découvrir. Dire pourquoi en quelques mots.

Un échantillon d’œuvres qui m’ont marquée et impressionnée, au sens propre d’une trace qui me semble indélébile :

J’ai récemment eu très envie de revoir Nuytten/Film, de Caroline Champetier. (Je n’ai pas trouvé d’offre VOD du film, je me suis rabattue sur une interview passionnante de la cinéaste au Café des images.) Cette rencontre entre deux artistes qui font le choix de s’effacer (on ne voit jamais leur visage il me semble) pour laisser place à la puissance des images et des sons me touche énormément.

Je redécouvre régulièrement les films d’Yvonne Rainer, seule ou avec mes étudiants. Je suis toujours aussi fascinée par la liberté et l’absence d’idées préconçues avec laquelle elle aborde chacun de ses médiums : la danse et / ou le cinéma, l’écriture. Chaque visionnage provoque en moi de nouveaux questionnements. Sur le corps, le mouvement…

Toujours sur cette idée du corps féminin en (grand) mouvement, mais également de la naissance du désir, la scène de danse dans Fish Tank d’Andrea Arnold est pour moi inoubliable. Je l’ai vu un soir au festival de Motovun en Croatie et je me souviens avoir eu le souffle coupé à ce moment précis du film. Les dieux du cinéma aussi visiblement, puisque quelques secondes plus tard l’électricité sautait dans tout le village. La projection a été reportée au lendemain et je n’en revenais pas de ma chance de pouvoir revivre aussi vite ce moment.

Tous les « films-maisons » de Chantal Akerman. Je ne me lance pas sur le sujet sinon je ne m’arrête pas, mais Jérôme Momcilovic a écrit un superbe livre amoureux sur le sujet, « Dieu se reposa, mais pas nous ».

Enfin, parmi les personnages féminins avec lesquels je ne me lasse pas de (re)passer du temps: les Gilmore Girls d’Amy Sherman-Palladino et la Fleabag de Phoebe Waller-Bridge…

4 – un adjectif pour qualifier ton féminisme

Furieux-doux. Mais une référence anatomique serait plus précise: mon féminisme est une colonne vertébrale, au même titre que l’engagement en faveur de l’équité et de la justice avec lesquels j’ai eu la chance de grandir et avec lesquels j’essaye de continuer de me construire.