Sophie Frilley est Directrice générale de Titrafilm. Presque un siècle après sa création, TITRAFILM demeure une entreprise familiale, spécialisées dans les métiers de la post production audio, de la localisation internationale (sous-titrage et doublage en plus de 30 langues), de l’accessibilité (sous-titrage pour sourds et malentendants et audiodescription pour aveugles) et dans la création des fichiers de diffusion pour le cinéma, les chaînes de télévision et les plateformes digitales (Netflix, Google, Itunes….).
Basée à Saint Ouen, TITRAFILM compte une vingtaine de studios d’enregistrement et de mix. Ses prestations répondent aux besoins techniques et artistiques des producteurs, distributeurs et diffuseurs de longs et courts-métrages de cinéma, de séries de fictions et d’animation et de tous programmes documentaires et de flux.
1 – Ton confinement : il a lieu où et tu l’envisages/le vis comment ?
Je suis confinée chez moi à Paris avec deux de mes enfants. Je vis cette parenthèse comme un moment offert, connectée au monde grâce aux informations qui me parviennent des médias et par TITRAFILM qui poursuit très activement son activité en mode « remote », mais avec cependant une perspective très intérieure.
Le temps qui me reste, je le mets à profit pour faire connaissance de mes ados que je connaissais pourtant très bien lorsqu’elles étaient petites et que je redécouvre aujourd’hui à 13 et 15 ans. Nous faisons des activités ensemble comme si nous étions en grandes vacances, ce que nous n’avons jamais la disponibilité de faire en temps normal car je vis à 100 à l’heure, très prise par TITRAFILM, avec beaucoup de déplacements : de la cuisine, des jeux de société, des discussions tardives, des visionnages de films ou de séries, des chorégraphies, des récitals de musique, des services rendus à l’une ou à l’autre. Nous discutons de leurs matières scolaires, de leurs lectures. Nous nous interrogeons sur le monde : comment va-t-il reprendre sa marche après la pandémie, que peut-on changer ?
C’est peut-être puérile, mais je réalise la valeur de conserver tout cela dans mon quotidien d' »après ».
2 – Comment tu as connu le Lab et ce que tu y as vécu, ce que tu en penses.
J’ai connu le Lab par la formidable équipe du Festival des Arcs dont TITRAFILM est partenaire depuis 4 ans; nous réalisons les sous-titrages de tous les films sélectionnés.
Lorsque Fabienne et Guillaume m’ont sollicitée pour intervenir lors d’un atelier sur la parité il y a deux ans, j’étais curieuse et un peu intimidée aux côtés des personnalités présentes, car nos métiers, en post-production et en distribution, sont des métiers techniques et créatifs de coulisses, mais nos positions sont fortes, comme au Lab.
A TITRAFILM, nous sommes inclusifs depuis longtemps : origines sociales ou géographiques, préférences sexuelles, genres, religions; nos équipes sont riches de notre diversité, à l’image des cinémas sur lesquels nous intervenons. L’engagement de TITRAFILM se porte également sur l’inclusion des personnes déficients sensorielles, sur la formation des jeunes et bien sûr sur la parité : je suis la 3ème femme dirigeante de la société sur 4 depuis sa création.
En ce temps de pandémie inédite, la tolérance existante entre les membres de TITRAFILM a donné naissance à une immense solidarité qui me touche régulièrement… on progresse tous !
3 – Cite un ou plusieurs films réalisés par des femmes qui t’ont marqué·e et que tu as envie de faire découvrir. Dire pourquoi en quelques mots
Je citerais sans ordre de préférence :
– « Pupille« , de Jeanne Héry, qui a su nous faire voir les premières semaines d’un nouveau-né sous X à travers son regard de nouveau-né. La douceur de la réalisatrice se ressent dans chaque plan, et son oeil critique et tendre nous fait prendre conscience, s’il le fallait, de l’inégalité existant entre les hommes dès leur naissance.
– « Party Girl » de Claire Burger. Ce film a parlé à mon coeur car j’ai passé 15 ans de ma jeunesse à Forbach, l’ex-ville minière où tente de se reconstruire l’héroïne du film, entre détresse, fierté féminine, temps qui passe et soif de vivre, ce qui nous ressemble surement toutes, quelles que soient nos origines sociales.
– « Zéro Dark Thirty« , un vrai « film d’homme » (😆), réalisé par Katheryn Bigelow avec la force d’un homme, des moyens de production mis habituellement à la disposition d’un homme, qui met en scène une femme brillante dans un univers quasi exclusivement masculin. J’aime les films d’action, de tactique, l’actualité, la géopolitique et la mise en scène de la brillance de l’esprit des femmes.
– « Polisse » de Maywenn, pour l’attachement qu’elle a su créer avec chacun des membres de la Brigade de Protection des Mineurs qu’elle met en scène et la sensibilité avec laquelle nous partageons les tragédies qu’ils vivent au quotidien.
– « Revenge« , de mon amie Coralie Fargeat, pour la force de survie de l’héroïne face à la virilité dénuée de tout scrupule moral de ses agresseurs, et pour l’esthétisme des plans qu’elle nous offre.
– Enfin, une websérie documentaire d’animation : « Les espionnes racontent » de Chloé Aeberhardt réalisé par Aurélie Pollet, disponible sur ArteWeb, dressant le portait de 7 espionnes : quels rôles ont-elles rempli, comment elles sont entrées au service des gouvernements qui les ont employées. Des héroines, des victimes, des femmes plus ou moins libres. Passionnant.
4 – un adjectif pour qualifier ton féminisme
Je suis une féministe humaniste, une inclusive de tous genres, curieuse de la personnalité de chacun(e). Je suis favorable à ce que tous rayonnent, hommes et femmes, et que les succès des uns profitent à ceux des autres. Chacun, quelque soit son genre, dispose de qualités précieuses, de talents inégalés. Mettons les à profit pour grandir ensemble et créer de la valeur commune. C’est l’esprit que nous avons à TITRAFILM, celui que je tente de transmettre à mes enfants, celui que je m’engage à faire régir dans ma vie.