Ancien délégué général de la Quinzaine des réalisateurs à Cannes, Frédéric Boyer est à la fois le Directeur artistique des Arcs Film Festival depuis sa création et du prestigieux Festival de Tribeca à New York.

1 – Ton confinement : il a lieu où et tu l’envisages/le vis comment?

Je suis confiné à New York où l’atmosphère est électrique. On peut sortir sans restriction d’espace mais tout est fermé et il n’y a personne dehors alors que le printemps se réveille. Quand on sait que 44% des Américains n’ont pas d’assurance maladie, il y a une certaine frilosité à prendre le metro ou faire ses courses au food store.

Quant à moi, je passe pas mal de temps à travailler pour le festival de Tribeca, le festival a été reporté, mais on essaye de monter un festival virtuel comme beaucoup d’autres. Mon temps libre est dédié aux abdos fessiers et autres stretchings cosmiques tantras. J’en ai jamais autant fait dans ma vie.

Comme beaucoup, films et séries occupent mon quotidien, Criterion Chanel et Tcm sont mes chaines favorites pour éviter de sombre dans le binge watching Netflix où les dialogues l’emportent toujours sur le cinéma. Sur le net, je suis assez obsédé par le site https://disquesobscurs.fr/ dédié aux disques oubliés de l’histoire du rock, de la soul et de la variété. J’y ai découvert un groupe de rock garage composé uniquement de filles et qui n’ont sorti qu’un seul album en 1969. The Feminine Complex. Je recommande également « In My Own Time « de Karen Dalton un splendide album folk de 1971, porté par la grâce.

2 – Comment tu as connu le Lab et ce que tu y as vécu, ce que tu en penses

J’ai connu le Lab, comme beaucoup, au Festival des Arcs. Je suis allé à un atelier la première fois un peu à reculons, mais Fabienne a su, à chaque fois, laisser les participants parler, s’écouter, débattre, ne pas être d’accord parfois dans une belle convivialité. Une expérience humaine par petits groupes ou souvent les participants ne se connaissent pas. Et comme le sujet est assez inépuisable, je ne suis pas prêt de me lasser de ces parenthèse enchantées…

3 – Cite un ou plusieurs films réalisés par des femmes qui t’ont marqué·e et que tu as envie de faire découvrir. Dire pourquoi en quelques mots

Humpday de Lynn Shelton, un film hilarant à tout petit budget qui questionne le genre et la sexualité « entre amis » . Un faible remake français a été réalisé. Comme quoi le regard au féminin, ça compte.

Red Road d’Andrea Arnold, avant Fish Tank. C’est son premier film, rugueux, social et terriblement humain. Elle réalisera un autre chef d’oeuvre, American Honey qui, à mon avis, méritait la Palme d’Or à Cannes en 2016.

Attenberg, un autre premier film par la productrice de Lanthimos, Athina Rachel Tsangaris. Iconoclaste, burlesque, émancipé. Un peu de Jacques Tati, un peu de mythologies grecques.

After The Wedding, de Susan Bier, son meilleur film, très beau script sur le thème de la richesse et de l’amour. Une radiographie bouleversante de la bourgeoisie Danoise et l’un des plus grands rôles de Mads Mikkelsen.

Variety de Bette Gordon, un film méconnu des années 80, considéré à l’époque comme un Vertigo au féminin. La vie et les tourments d’une caissière de cinéma adulte et tourné à New York avant internet et les portables. Vu à l’époque, le souvenir des films ont souvent autant d’importance que les films eux mêmes…

Sinon des coups têtes dans le désordre :
Travolta et moi de Patrica Mazuy
Le Fils du Requin d’Agnes Merlet
The Bigamist, d’Ida Lupino
Wanda de Barbara Loden,
Elle s’appelle Sabine de Sandrine Bonnaire
Old Joy de Kelly Reichardt
et plus récemment :
Proxima d’Alice Winocour
Corps et âmes d’ Ildiko Enyedi.

Et puis bien sûr, tout Chantal Ackerman, tout Julie Delpy, tout Marie Lozier et tout Alice Rohrwacher.

4 – un adjectif pour qualifier ton féminisme

Tenace