Participant·e·s

Les 40 scénaristes présent·e·s dans le cadre du CANNESERIES Writers Club. Avec notamment Camille de Castelnau, Benjamin Dupas, Marine Franco, Fanny Herrero, Cathy Verney

Coach

Fabienne Silvestre, Coach et Co-fondatrice du Lab

Observatrices

Emma Pagès, Assistante Lab – Femmes de cinéma
Shirin Rashidian, organisatrice CANNESERIES Writers Club
Kelly Verny, Talent handler CANNESERIES

Les principaux enjeux de la diversité dans les séries qui ont émergé au cours de l’atelier

La question des diffuseurs. Il semblerait que l’enjeu de la place de la diversité dans les séries se situe à deux niveaux – d’abord dans la phase d’écriture puis par la suite chez les producteurs et les diffuseurs. Il faut se demander qui fabrique les séries et qui est repré- senté dans les séries. Les diffuseurs et producteurs souhaitent que les séries soient diver- sifiées mais ne se rendent pas toujours compte de l’implication financière en termes de temps et d’énergie que cela nécessite.

Une révolution en cours nécessaire. Il semblerait que rajouter « trop » de diversité n’est pas un vrai risque en effet et ne pas être timide sur ce sujet permet de contre-balancer les déséquilibres déjà existants et de créer un réel équilibre.

Une révolution qui ne doit pas être un frein à la liberté. L’auteur doit être libre dans son scénario de « cocher des cases » pour représenter la diversité, ou non, principalement lorsque cela ne sert pas l’histoire et qu’il devient artificiel de les cocher. Autrement dit, la diversité ne doit pas être un sujet en soi mais doit être intégrée de manière beaucoup plus systématique. Entre alors en jeu la question d’une prise de conscience plus grande encore afin qu’un mécanisme inconscient se mette en place dans l’intégration de la diversité.

La force, la responsabilité et le pouvoir des scénaristes. Ils·elles peuvent et doivent être en mesure de se plonger dans la peau d’à peu près n’importe qui. C’est une force qui leur donne le pouvoir de faire évoluer les mentalités, de donner à voir à la société des représentations dé-stéréotypées et ainsi de faire bouger les lignes. Il ne fait aucun doute que les scénaristes ont une responsabilité immense à ce niveau là.

L’ambivalence du communautarisme et la question de la légitimité. Il existe un communautarisme blanc masculin dans les séries et contradictoirement, lorsqu’un·e scénariste présente un projet qui évoque la diversité, on lui reproche souvent d’être « trop communautaire » – c’est un mouvement de recul qui empêche parfois d’évoquer certains sujets liés à la diversité. À cela s’ajoute un sentiment d’illégitimité dans l’évocation de problématiques liées à la diversité lorsque les scénaristes eux-mêmes n’en sont pas issue·s. La prise de parole n’est pas évidente et semble créer un malaise qui fonctionne ensuite comme un cercle vicieux remettant systématiquement en cause la légitimité des auteurs.

L’importance de l’éducation et de la formation. Éducation au sens large – comprendre l’autre et faire en sorte qu’il y ait un mouvement d’éducation assez général. L’importance de la formation – le métier de scénariste n’est pas accessible à tous, c’est un luxe de pouvoir écrire auquel n’ont accès que des personnes issues de milieux favorisés. Il y a un réel enjeu dans l’accessibilité à l’écriture afin que toutes les histoires puissent se raconter et que les voix des personnes issues de la diversité soient entendues.

La phase d’écriture et la question de la writing room. Lorsque les scénaristes écrivent et pensent les personnages, il semblerait qu’ils·elles ne se posent pas encore assez la question du « et si? » (c’était une femme, un homme, un handicapé…) afin de voir si cela change vraiment quelque chose à l’histoire qui est racontée. Par ailleurs, il ressort une peur de la chronique en France, avec une sur-valorisation du plot qui rend plus difficile l’évocation avec finesse des questions liées à la diversité.

Un impact variable sur la diversité selon l’audience. Certaines chaînes adaptent leur contenu selon l’audience et les attentes de leur public a priori. Il semblerait qu’un tel fonctionnement empêche parfois un impact réel sur la diversité, ne poussant pas à la sensibilisation du public qui devrait justement être celui sensibilisé sur ces questions.

Les quotas. Pour beaucoup, ils sont toujours vu comme un passage en force mais tout de même considérés comme pouvant être une solution efficace à moyen terme pour plus de diversité.

Quelles idées pour faire bouger les lignes?

  • Faire de la diversité un non-sujet systématiquement abordé et la représenter à l’écran comme un non-événement.
  • Writing room : intégrer des auteurs de statuts juniors et des stagiaires payés et composer la room de manière diversifiée, avec des personnes directement concernées par le sujet abordé.
  • Éducation : les scénaristes pourraient aller dans les collèges/lycées expliquer leur métier afin d’éveiller les consciences, de donner envie de choisir la profession de scénariste, d’éveiller ce désir chez les plus jeunes.
  • Les scénaristes eux-mêmes pourraient intervenir dans les milieux défavorisés et créer un échange en profondeur avec les personnes issues de la diversité.
  • Faire bouger davantage les diffuseurs et les producteurs sur ces questions et refuser les exigences discriminantes.
  • Être pro-actif du coté des showrunneurs et ne pas s’interdire l’affirmative action.
  • S’adresser aux minorités qu’on veut représenter, leur demander quels sont les clichés présents dans les fictions – être conscient des clichés.
  • Faire du métier de scénariste un métier moins précaire : un statut d’auteur, plus de reconnaissance, plus d’aides, permettraient une plus grande diversité parmi les scénaristes.
  • Développement d’une lucidité des scénaristes sur leur propre travail, d’une remise en question directe quant à la justesse dans la façon dont la diversité est adressée/abordée.
  • Flécher une partie de l’argent public conditionné à l’inclusion dans les projets et dans les writing rooms.
  • Sensibiliser les comités de sélection des festivals sur ces sujets : aborder la question de la diversité de manière beaucoup plus systématique.

*Pour mémoire : règles de confidentialité et de publication du Lab :

Nous utilisons la règle dite de Chatham House, du nom d’un célèbre think tank britannique.

Cette règle est utilisée pour réglementer la confidentialité des informations échangées lors d’une réunion : quand une réunion se déroule sous cette règle, les participants sont libres d’utiliser les informations collectées à cette occasion, mais ils ne doivent révéler ni l’identité, ni l’affiliation des personnes à l’origine de ces informations. Cela permet une plus grande liberté de parole et des prises de positions plus fortes.

La liste des participants aux ateliers est en revanche publique, dans le but d’indiquer la diversité et la qualité des personnes présentes et donner de la valeur aux idées émises.