Participant·e·s

Les 55 scénaristes dont 20 internationaux, présent.e.s dans le cadre du CANNESERIES Writers Club.

Avec la participation d’Aline Marrache, Vice-Présidente de PFDM, de Vanessa Djian et de Karolyne Leibovici, co- fondatrices de « Girls support girls ».

 

Coach et facilitatrices

Fabienne Silvestre, responsable des Relations institutionnelles et de la Diversité à CANNESERIES, Coach et co-fondatrice du Lab.

Sandrine Brauer, co-Présidente du Collectif 5050

 

Observatreur.ice.s

Mathilde Bollet, Assistante Relations institutionnelles et Diversité à CANNESERIES.

Camille Bonvallet, CANNESERIES.

Philippe Gray, acteur et réalisateur.

Shirin Rashidian, organisatrice du CANNESERIES Writers Club.

L’importance de la représentation de la diversité dans l’écriture

 

Le premier constat qui ressort de cet atelier est que toutes et tous les scénaristes présents se sentent naturellement concernés par la question de la représentation de la diversité dans leur travail. Ils et elles y ont tous et toutes déjà pensé et réfléchi. C’est un sujet qui les anime, et sur lequel tous et toutes avancent, en se posant des questions, et en cherchant des réponses. Les scénaristes sentent avoir une véritable responsabilité sur ce sujet.

Du point de vue des scénaristes présent.e.s, représenter la diversité est d’une importance capitale, car ce que nous voyons à l’écran a un impact concret sur la société. La façon dont nous nous voyons, dont nous nous sentons représentés à l’écran, notamment dans la fiction, a une influence sur la façon dont nous nous considérons dans la vie. C’est pourquoi il faut être très clair sur le fait que les étiquettes, les stéréotypes, les clichés sont terriblement limitants et malsains.

La représentation de la diversité à l’écran, et donc avant tout dans l’écriture des scénarios, représente désormais une nécessité, et un devoir, pour les scénaristes. Il s’agit en effet d’une façon de combattre les stéréotypes persistants. Cette nécessité, et cette volonté, semblent venir se heurter au fait que leurs inspirations, et leurs influences sont elles-mêmes rarement issues de la diversité. Cela entraine le désir des scénaristes à élargir leur champ de vision et de connaissance, et de s’intéresser à ce qui se fait ailleurs.

À cela s’ajoute le fait que la plupart des autrices et auteurs ne sont pas issus eux-mêmes de la diversité. Lorsqu’ils ou elles écrivent des personnages féminins, homosexuels, racisés, ou bien loin de leur réalité, cela devient un sujet en soi. La diversité à l’écran est malheureusement à l’image de la diversité chez les scénaristes : les auteur.ice.s devraient être issu.e.s de la diversité, autant que les personnages.

Les auteur.ice.s doivent faire face aujourd’hui à une réticence qui vient d’au-dessus : il s’agit de la méfiance et la résistance des diffuseurs et des décideurs sur les sujets représentant la diversité. C’est contre cela que les scénaristes doivent se battre aujourd’hui. Les diffuseurs et les producteurs sont ceux qui ont le pouvoir de renverser les choses et ils semblent moins prêts que les scénaristes à mettre de la diversité dans les séries.

Certain.e.s font également un constat plus personnel pour inciter les autres à mettre de la diversité dans leurs personnages et dans leur travail : en évitant le danger des clichés, écrire d’un autre point de vue, écrire un personnage différent de soi est un processus très excitant et enrichissant. Évidemment, se sentir concerné par la question de la diversité n’empêche pas la complexité que ce sujet soulève, il s’agit d’enjeux à la fois personnels et universels pour les auteur.ice.s de fiction d’aujourd’hui.

 

Les enjeux de la représentation de la diversité pour les auteurs et autrices

 

La question de la liberté est centrale dans le processus d’écriture. Selon les scénaristes présents, il y a la liberté qu’on leur accorde et la liberté qu’ils et elles s’accordent eux et elles-mêmes. D’abord si les auteurs et autrices se sentent libres, ou ont l’envie de liberté dans leur écriture, la diversité devient souvent un problème pour les diffuseurs. La diversité est un enjeu à diverses échelles, elle reflète la réalité de toute une industrie. Pour les scénaristes, cela signifie que se sentir libre, c’est prendre des risques.

Pour les auteur.ice.s la liberté dans la représentation de la diversité est souvent une question de légitimité : doit-on être un homme noir pour écrire sur un homme noir ? Puis-je écrire sur une femme lesbienne si je ne suis pas lesbienne ? La différence entre leur réalité et la réalité de personnages potentiellement issus de la diversité, et la peur de « mal » représenter forment des freins à l’inclusion de la diversité dans l’écriture.

Une première solution évidente émerge rapidement : avoir davantage de scénaristes issus de minorités pour écrire des personnages de la diversité. Il faut de la différence au sein des auteur.ice.s pour qu’ils puissent défier la majorité. Il est également dit, que souvent, écrire sur soi lorsque nous sommes justement issu d’une minorité, peut s’avérer compliqué : il y a la peur de s’exposer, de présenter quelque chose de différent, la peur d’être rejeté ou incompris ; ce qui est très difficile à subir lorsque nous écrivons avec une expérience personnelle, un vécu intime.

Il ressort beaucoup de ces discussions que l’échange, le contact et l’ouverture sont des moyens de surmonter ces obstacles à la diversité dans l’écriture. L’important est de savoir se renseigner, s’entourer de personnes reliées à notre sujet, faire des recherches, avoir les bonnes informations, poser les bonnes questions. Il est essentiel de rester aussi dans une logique d’humilité et surtout d’authenticité, rester passionné par ce que nous écrivons, par notre sujet.

Le but est d’arriver naturellement, organiquement à avoir de la diversité dans des projets qui ne sont pas uniquement des projets au sujet de la diversité. Il faut de la diversité partout. C’est aussi une question de créativité et de curiosité. Il faut savoir se questionner, remettre en question son travail au sujet de la diversité.

Quelles idées pour faire bouger les lignes?

  • Agir concrètement. Parler et échanger notamment au sujet des enjeux de la diversité est une façon de questionner son travail, de s’ouvrir et de se poser les bonnes questions. Or chaque affirmation qui est faite ici, doit impérativement donner naissance à une action concrète. La parole est une première chose, et elle est importante, mais l’action doit suivre. CANNESERIES doit d’ailleurs s’appliquer cette règle, et ne pas limiter son action en faveur de la diversité à l’organisation d’ateliers de scénaristes sur la question. Qu’en est-il de faire sa part, en y associant a minima des personnes qui n’y ont pas accès naturellement?
  • Inclure la diversité dans le casting. Chaque scénariste doit assumer ses responsabilités, et essayer au maximum d’influencer le casting, car c’est aussi là que se joue la question de la diversité.
  • Utiliser les outils existants. Les auteurs et autrices peuvent s’aider des outils et des actions qui existent déjà comme le programme de mentorat du Collectif 5050. Il faudrait faire davantage de Workshop avec des diffuseurs et des producteurs également, pour que les auteur et autrices puissent défendre leur position face à ces derniers. Il faudrait simplement sortir de son monde, de sa zone de confort et aller donner des opportunités à celles et ceux qui n’ont pas de privilèges, aller les chercher pour les laisser s’exprimer et apporter leur expérience, leur vécu.
  • Sensibiliser les diffuseurs. D’après les scénaristes, un travail d’éducation auprès des diffuseurs est nécessaire : il s’agit d’inverser les rapports de force. Pour cela il faut davantage mettre en avant des succès qui représentent la diversité, comme c’est le cas dans la série Sex Education, il faut également avoir de véritables exemples de diversité dans l’écriture et à l’écran, faire évoluer ses références et ses inspirations.
  • Faire de la diversité la norme. Lorsque nous écrivons, il faut se poser la question pour chaque personnage, tant des premiers rôles que des personnages secondaires : la diversité doit être diffuse. Il faut dépasser la question de la diversité à l’écran, pour qu’elle ne soit plus un sujet en soi mais la norme.
  • Encourager davantage de scénaristes issus de la diversité. Une nouvelle génération de scénaristes davantage issus de la diversité qui se sentent libres et capables de représenter la diversité avec sincérité, et pourront faire bouger les lignes, répondre aux besoins d’une nouvelle audience, plus large et en demande de plus de diversité. Cela pourrait de fait, faire évoluer la mentalité des diffuseurs.

Citations pépites

« Il a des histoires manquantes, il y a des visages manquants. »

« Les auteurs devraient être aussi divers que leurs personnages. »

« On demande toujours aux auteurs ce que signifie la diversité dans une histoire, les gens ne comprennent pas qu’il s’agit simplement de caractérisation d’un personnage. »

« Écrire la diversité tout en étant précis et honnête. »

« Il faut laisser les vieux diffuseurs qui ne veulent pas de diversité mourir avec leur audience. »

 

*Pour mémoire : règles de confidentialité et de publication du Lab :

Nous utilisons la règle dite de Chatham House, du nom d’un célèbre think tank britannique.

Cette règle est utilisée pour réglementer la confidentialité des informations échangées lors d’une réunion : quand une réunion se déroule sous cette règle, les participants sont libres d’utiliser les informations collectées à cette occasion, mais ils ne doivent révéler ni l’identité, ni l’affiliation des personnes à l’origine de ces informations. Cela permet une plus grande liberté de parole et des prises de positions plus fortes.

La liste des participants aux ateliers est en revanche publique, dans le but d’indiquer la diversité et la qualité des personnes présentes et donner de la valeur aux idées émises.